Augur propose des « death markets »
Augur, un site permettant de miser sur la réalisation d’événements divers et variés, a vu récemment apparaître de nouveaux marchés de prédictions, portant sur le meurtre potentiel de certaines figures publiques.
Ainsi, même s’il est loin de constituer le marché le plus populaire de la plateforme, plus de 50 coins (soit environ 1 500 dollars) ont déjà été pariés sur un assassinat de Donald Trump qui surviendrait au cours de l’année 2018. Les utilisateurs estiment collectivement que la probabilité d’un tel événement s’élève à 5%.
Et d’autres paris similaires existent : il est également possible de miser sur la survie de l’actrice Betty White ou du sénateur John McCain d’ici au 1er janvier 2019.
Même si certaines applications décentralisées (dApps) « cachent » ces marchés à leurs utilisateurs, il n’existe en théorie aucune manière de décider unilatéralement de les retirer du réseau Augur. Ceux-ci sont donc accessibles à travers n’importe quelle interface dont les développeurs ont choisi de ne censurer aucun pronostic.
Des marchés à interdire ?
Un débat houleux à agité la crypto-sphère : doit-on interdire de tels pronostics, jugés illicites dans de nombreuses régions du globe ? Si oui, qui doit en être tenu responsable ?
D’autant qu’au-delà des aspects légaux et éthiques, ces marchés supposent une incitation financière qui pourrait pousser un individu à miser une grosse somme d’argent sur le décès d’une figure publique, avant d’assassiner celle-ci pour pouvoir remporter son pari.
Les soutiens de la plateforme Augur estiment que les développeurs à l’origine du projet ne devraient pas être tenus responsables du mauvais usage qui pourrait être fait de cette technologie décentralisée, dans la mesure où ils n’ont pas le pouvoir de censurer les marchés immoraux et/ou illicites. Certains ont comparé cette problématique à celle déjà posée par des technologies comme le chiffrement, qui peuvent être aussi bien utilisées pour de bonnes et de mauvaises raisons.
Et l’on peut penser que l’émergence de ces « death markets » constitue le revers de la médaille inéluctable d’une plateforme de prédictions qui souhaite échapper à toute forme de censure.
If Augur is decentralized, then this will continue to happen.
If it’s not decentralized, then why is it sitting on a blockchain ?Censorship resistance means nothing if you only want to allow nice, legal, culturally acceptable things. https://t.co/7OFXezjqCR
— Angus C de Crespigny (@anguschampion) 24 juillet 2018
Jusqu’à hier, les développeurs disposaient d’un « kill switch » qui leur permettait de mettre fin à certains contrats déployés sur le réseau. Celui-ci avait été pensé pour leur offrir la possibilité de résoudre une potentielle faille critique, afin de pouvoir se prémunir face à des attaques similaires à celle dont avait été victime en 2016 The DAO, l’organisation décentralisée autonome déployée sur le réseau Ethereum.
Comme deux semaines se sont écoulées depuis le lancement d’Augur sans que le moindre incident n’ait été constaté, ses concepteurs ont transféré la propriété de ce « kill siwtch » à une adresse fantôme – par conséquent, plus aucune entité ne dispose désormais d’une quelconque mainmise sur le réseau.
Happy two weeks ! ? Ownership of the escape hatch has been transferred to the 0x000..0001 address.
— Augur (@AugurProject) 24 juillet 2018
La sagesse de la foule
Dans la mesure où la plateforme Augur est décentralisée, son réseau s’appuie sur la sagesse de la foule – autrement dit, l’intelligence collective – afin de déterminer la probabilité d’un événement.
Et c’est également la communauté des utilisateurs qui est censée décider si les marchés proposés sont suffisamment éthiques pour y être référencés. Les individus chargés de vérifier la réalisation d’événements ont ainsi la possibilité de signaler un marché comme étant immoral, et d’empêcher les parieurs de pouvoir y participer.
Sauf que rien ne permet de s’assurer que ces individus décideront de censurer ces pronostics litigieux. D’autant qu’ils sont susceptibles d’être financièrement pénalisés s’ils indiquent qu’un marché leur semble non éthique, et que cette vision est différente de celle du consensus formé par les autres utilisateurs.
Référence : CCN