Christine Lagarde, la directrice générale du Fonds Monétaire International (FMI), a récemment appelé les banques centrales à envisager d’émettre leur propre monnaie numérique.
Voilà des déclarations qui peuvent sembler surprenantes.
Lors d’un discours tenu au cours du Singapore Fintech Festival, Christine Lagarde a déclaré que les États devraient « envisager la possibilité d’émettre leur monnaie numérique ». Dans des propos rapportés par la BBC, la dirigeante du FMI a évoqué les différents atouts que peuvent procurer ces monnaies, qui seraient émises par les banques centrales.
« Je pense que nous devrions envisager la possibilité d’émettre des monnaies numériques », a‑t-elle déclaré. […] L’avantage est clair. Votre paiement serait immédiat, sécurisé, peu coûteux, et potentiellement semi-anonyme […] Et les banques centrales pourraient ainsi conserver leur influence dans les paiements », a‑t-elle déclaré.
Mme Lagarde a notamment cité les exemples de la Suède, du Canada et de l’Uruguay, dont les banques centrales « envisagent sérieusement » d’émettre leur propre monnaie numérique.
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Une question de sécurité
Pour Christine Lagarde, ces monnaies placées sous la responsabilité des États pourraient être plus sécurisées que les crypto-monnaies existantes. La dirigeante a laissé entendre que les actifs numériques qui s’échangent aujourd’hui sur les marchés ne le sont peut-être pas suffisamment :
« Les sociétés privées pourraient être tentées de sous-investir dans la sécurité, dans la mesure où elles ne perçoivent pas forcément les coûts sociaux d’échecs de paiements », a‑t-elle prévenu en évoquant les crypto-monnaies actuelles.
Ces déclarations, qui risquent de faire bondir de nombreux crypto-enthusiasts, interviennent alors que l’institution qu’elle dirige s’est récemment prononcée contre le lancement d’une monnaie numérique nationale. Il s’agissait du Sovereign (SOV) que souhaitent émettre les Îles Marshall. En effet, le FMI estime que cette initiative pourrait induire des risques macroéconomiques pour l’État.
« Massivement disruptives »
En octobre 2017, la dirigeante du FMI avait déclaré à CNBC que, dans la mesure où les crypto-monnaies réduisaient le coût des transactions financières, elles devraient bouleverser le système financier traditionnel.
« La manière dont les nouvelles technologies permettent de réduire le coût des transactions financières, les rendant plus accessibles […] Je pense qu’elles sont déjà massivement disruptives », avait-elle alors déclaré.
Malgré la perception généralement négative des crypto-monnaies, notamment du fait de leur nature pseudoynme (ou anonyme), Mme Lagarde semble reconnaître les atouts de ces devises – des devises qu’elle souhaite toutefois encadrer étroitement. Dans un article publié en avril dernier, elle avait appelé ses lecteurs à à « garder un esprit ouvert » vis-à-vis des « crypto-actifs ».
« De la même manière que quelques technologies de l’ère numérique ont transformé nos vies, les crypto-actifs qui survivront pourraient avoir un impact significatif sur la façon dont nous épargnons, investissons et payons nos factures. C’est pourquoi les responsables politiques doivent garder un esprit ouvert, et doivent s’efforcer de mettre en place un cadre réglementaire équitable qui minimise les risques tout en permettant au processus créatif de porter ses fruits ».
Sur Twitter, plusieurs observateurs ont fait remarquer que les monnaies émises par les banques centrales étaient déjà principalement numériques, laissant supposer que le FMI souhaiterait avant tout accroître le contrôle des États sur celles-ci.
Silly. Central Bank currency is already mostly digital. Making it entirety digital just increases gov’t control over it, & incentives adoption of hard sovereign digital cash : Bitcoin. https://t.co/jG4q00euyT
— Saifedean Ammous (@saifedean) 14 novembre 2018
Il s’agit malgré tout pour Anthony Pompliano, le fondateur de Morgan Creek Capital, d’une nouvelle positive qui viendrait offrir une plus grande légitimité à des actifs souvent controversés – et qui pourrait, à terme, conduire des États à s’intéresser au Bitcoin :
The Head of the IMF gave a speech today that legitimized cryptocurrencies.
She said state-backed digital currencies could provide financial inclusion, security & consumer protection, and privacy in payments.
The virus is spreading and now the IMF is infected ! ?
— Pomp ? (@APompliano) 14 novembre 2018
It is a progression of thought.
First they don’t believe in digital currencies. Then they fight them. Then they say there could be a role for them to play if state backed. Eventually they realize Bitcoin is the answer.
Patience is key here. Everyone eventually comes around 🙂
— Pomp ? (@APompliano) 14 novembre 2018
Références : CCN, Bitcoinist, IMF.org