Dans un article publié lundi dans le quotidien britannique The Guardian, Kenneth Rogoff, ancien chef économiste du FMI, a donné son point de vue sur les crypto-monnaies.
Il estime que si certains observateurs jugent que les actifs numériques sont proches de la fin et que la tendance baissière qu’ils traversent est irréversible, il est difficile d’affirmer avec certitude que leur prix va chuter à zéro.
L’économiste doute de l’adoption des crypto-monnaies au sein de grandes économies. Il estime que leur usage pourrait toutefois se généraliser dans certains états faisant face à des mesure restrictives, comme la Somalie, le Venezuela, la Corée du Nord ou encore l’Iran.
Une adoption qui ne pourrait avoir lieu qu’en dehors des grandes puissances économiques
Dans son article, M. Rogoff s’interroge sur la valeur intrinsèque du Bitcoin. Il pense que son statut « d’or numérique » n’est pas viable dans la mesure où, contrairement à l’or, il ne suppose aucune application en dehors d’un usage monétaire.
Par ailleurs, le professeur juge que les quantités d’énergie qui sont nécessaires pour assurer son fonctionnement le rendent moins efficient que le fait d’avoir recours à un système de banque centrale.
- À lire également : « Minage de Bitcoins : selon une étude, plus des trois quarts de l’activité est effectuée à travers des énergies renouvelables »
Selon lui, les grandes économies ne toléreront pas l’utilisation des crypto-monnaies dans leur état actuel puisqu’elles permettraient de faciliter le blanchiment d’argent. Et M. Rogoff estime que si l’on retirait l’anonymat (ou le pseudonymat) de ces actifs numériques, ceux-ci n’auraient plus grand intérêt.
Par conséquent, l’universitaire pense que l’usage et l’adoption des crypto-monnaies sur le long terme, dans leur forme actuelle, ne pourra avoir lieu qu’en dehors de grandes puissances économiques. Ces actifs numériques ne pourront ainsi prospérer que dans des états en faillite :
« Les régulateurs réalisent progressivement qu’ils ne peuvent promouvoir l’usage de technologies difficiles à tracer, qui permettent de faciliter l’évasion fiscale et l’activité criminelle. Dans le même temps, des banques centrales, de la Suède à Chine, réalisent qu’elles peuvent elles aussi émettre des monnaies numériques […] Lorsqu’il s’agit de nouvelles formes d’argent, le secteur privé peut innover, mais c’est au final le gouvernement qui les réglemente et qui s’en empare », explique-t-il.
Un « ticket de loterie »
Pour M. Rogoff, le Bitcoin est assimilable à un « ticket de loterie » dont la valeur à long terme est probablement proche de 100 dollars, mais qui pourrait un jour valoir 100 000 dollars – et ce pour certaines raisons qui restent encore difficiles à déterminer :
« [En 2016], j’avait indiqué que le fait que la valeur à long terme du Bitcoin soit vraisemblablement plus proche des 100 dollars que des 100 000 dollars ne signifiait pas que sa valeur était nulle. Les crypto-coins peuvent être assimilés à des tickets de loterie qui paieront lors d’un avenir dystopique, alors qu’il seront utilisés dans des pays corrompus ou ruinés, ou peut-être dans des régions au sein desquelles les citoyens auront perdu tout semblant de vie privée.
Ce n’est d’ailleurs pas une coïncidence si un pays aussi dysfonctionnel que le Venezuela est le premier à proposer une crypto-monnaie garantie par l’État (le Petro) ».
L’économiste reproche aux « évangélistes » de clamer que le Bitcoin « peut détenir une valeur importante à partir du moment où suffisamment d’individus le perçoivent comme un or numérique ». Il juge que cela ne permettra pas d’empêcher sa chute :
« Des économistes (dont je fait partie), qui travaillent sur ce type de problème depuis cinq décennies, ont découvert que les bulles qui entourent des actifs dont la valeur intrinsèque est nulle finissent par éclater. Le prix d’actifs qui n’ont pas de réelle valeur sous-jacente ne peuvent échapper aux références historiques ».
M. Rogoff a ajouté que ce seront les agissements des gouvernements qui devraient déterminer si le Bitcoin (et d’autres crypto-monnaies) parviendront à se démocratiser au sein des populations.
Avant d’entrevoir la possibilité selon laquelle la valeur de ces actifs pourrait prochainement se remettre à grimper :
« Alors que nous devrions pas nous étonner de la chute enregistrée par les prix des crypto-monnaies cette année, le cours de ces coins ne va pas nécessairement chuter à zéro. Comme des tickets de loterie, il existe une forte probabilité qu’ils soient sans valeur. Mais il existe également une probabilité extrêmement mince qu’ils vaudront un jour beaucoup d’argent, pour des raisons qui sont actuellement difficiles à anticiper ».
Référence : CCN
Cet article ne constitue pas une recommandation d’investissement. Nous vous suggérons de mener vos propres recherches avant de décider de vous procurer des crypto-monnaies – des actifs extrêmement risqués. Ne dépensez pas plus que ce que vous pouvez vous permettre de perdre. Nous ne saurons être tenus responsables de toute perte en capital, en lien avec la lecture de cet article.