Au cours des dernières années, le Bitcoin a majoritairement affiché de mauvaises performances en septembre. Pour certains experts, l’année 2021 pourrait constituer une exception si la dynamique actuelle du marché parvenait à ne pas s’essouffler.
Depuis plusieurs jours, le Bitcoin peine à décoller au-dessus de la barre des 50 000 dollars. Même s’il a dépassé ce seuil à plusieurs reprises, l’actif est loin d’afficher des performances similaires à celles de nombreux « altcoins », qui ont littéralement flambé au cours des dernières semaines.
Puisque la première cryptomonnaie se comporte souvent de manière cyclique, il peut être judicieux de s’intéresser aux tendances passées afin de tenter d’émettre des prédictions.
Historiquement, septembre constitue le pire mois pour le BTC. Une analyse de l’évolution de son cours depuis 2013 montre qu’il n’a enregistré de hausse ce mois-ci que 2 fois en 8 ans – en 2015 et 2016 – avec une augmentation jamais supérieure à 7%.
Pete Humiston, responsable de Kraken Intelligence – le département de recherche de la bourse d’échange Kraken – a expliqué au site CoinTelegraph ce que cette tendance pourrait signifier pour 2021 :
« Le mois de septembre est historiquement le mois des pires performances pour le Bitcoin. Ceci étant dit, il est proche des 50 000 dollars depuis maintenant environ 3 semaines.
Si le Bitcoin devait effectuer une percée au-dessus de ce seuil psychologiquement signifcatif, cela pourrait raviver l’intérêt des investisseurs et déclencher la dynamqieu nécessaire pour lui permettre de retrouver les 60 000 dollars ».
Au cours des 5 dernières années, le Bitcoin s’est retrouvé dans le rouge à 4 reprises en septembre, faisant de ce mois sa période la plus mauvaise.
Mais le seuil des 50 000 dollars est difficile à franchir. Le Bitcoin y était parvenu pour la première fois peu après les déclarations d’Elon Musk, le PDG de Tesla, qui avait annoncé le 8 février que son entreprise avait mis la main sur 1,5 milliard de dollars de BTC. Le fantasque entrepreneur avait également révélé qu’elle allait permettre à ses clients d’acheter ses véhicules électriques en Bitcoin.
Le BTC a toutefois déjà dépassé (certes légèrement), à plusieurs reprises, ce seuil au cours des derniers jours. Ceci pourrait constituer un signe positif pour l’actif numérique.
CoinTelegraph a interrogé à ce sujet Hunain Nasser, analyste principal pour OKEx Insights :
« En l’état actuel des choses, la lutte menée par le BTC sous les 50 000 dollars constitue la plus grande bataille que les “bulls” doivent gagner avant que l’on puisse s’intéresser aux 60 000 dollars.
La hausse de 50 000 à 60 000 dollars devrait être plus rapide que le mouvement actuel entre 40 000 et 50 000 dollars. »
Modèle S2F : le BTC en train de rattraper son retard
Le modèle « stock-to-flow » (S2F) proposé par l’analyste PlanB a été jusqu’ici l’un des plus efficaces pour tenter de prédire les évolutions du prix du Bitcoin.
Il s’appuie sur les cycles de « halvings » : tous les 4 ans, le rythme d’émission de nouveaux BTCs reçus à chaque bloc par les mineurs est divisé par 2, rendant l’actif plus rare – ce qui doit théoriquement accroître sa valeur sur les marchés.
Certes, le Bitcoin a toujours du retard : il devrait, selon le modèle, se situer légèrement au-dessus des 105 000 dollars.
Mais l’actif revient de loin, et se remet progressivement d’une large déviation par rapport au modèle. Fin juin dernier, beaucoup craignaient que le S2F soit invalidé, à commencer par son créateur. Alors que le BTC s’échangeait à moins de 35 000 dollars, PlanB reconnaissait que le « stock-to-flow » pourrait être démenti si le Bitcoin ne rebondissait pas dans les semaines à venir :
Even for me it is always a bit uneasy when bitcoin price is at the lower bound of the stock-to-flow model. Will it hold (like Mar 2019 when I published S2F, or Mar 2020 Covid, or Sep 2020 with BTC stuck at $10K) and is this another buying opportunity ? Or will S2F be invalidated ? pic.twitter.com/iIjTC2Ncy3
— PlanB (@100trillionUSD) June 23, 2021
Une question qu’il se posait toujours le 19 juillet, alors que le BTC était sur le point de plonger (brièvement) à moins de 30 000 dollars :
Bounce, or break, that is the question pic.twitter.com/qJyyXFSIIw
— PlanB (@100trillionUSD) July 19, 2021
Le 20 juin, il fournissait pourtant des prédictions haussières :
Bitcoin is below $34K, triggered by Elon Musk’s energy FUD and China’s mining crack down.
There is also a more fundamental reason that we see weakness in June, and possibly July. My worst case scenario for 2021 (price/on-chain based): Aug>47K, Sep>43K, Oct>63K, Nov>98K, Dec>135K pic.twitter.com/hDONOVgxH1
— PlanB (@100trillionUSD) June 20, 2021
[…] « Mon pire scénario pour 2021 (en se basant sur le prix et sur les indicateurs blockchain) : août > 47 000, septembre > 43 000, octobre > 63 000, novembre > 98 000, décembre > 135 000 ».
Le financier est également optimiste sur un horizon plus long. Fin juillet, il s’attendait toujours à un cours compris entre 100 000 dollars (comme l’indique le modèle S2F) et 288 000 dollars (comme prédit par un autre modèle plus récent, le modèle S2FX) au cours du cycle de « halving » 2020–2024.
#bitcoin .. up and onward pic.twitter.com/Vg5dcWnx90
— PlanB (@100trillionUSD) July 28, 2021
Notons par ailleurs que le Bitcoin a déjà nettement dévié du modèle S2F pendant près de 7 mois, entre octobre 2018 et juin 2019. À titre de comparaison, la déviation enregistrée actuellement n’a duré que 3 mois. Il convient également de noter que la courbe du modèle est extrêmement plate, et que la rangée à atteindre est sensiblement identique durant le 4ᵉ trimestre – potentiellement rien d’insurmontable au vu des performances historiques de la première cryptomonnaie.
Pour Hunain Nasser, le BTC pourrait effectivement atteindre les 100 000 dollars, et ce, d’ici à la fin de l’année :
« Compte tenu du sentiment actuel et des fondamentaux à long terme, il n’est pas exclu que le Bitcoin atteigne les 100 000 dollars d’ici décembre. D’autant que les mois d’octobre et de novembre sont historiquement de très bons mois pour le Bitcoin.
Ils pourraient facilement lui permettre d’atteindre les 100 000 dollars d’ici à la mi-décembre, avant une éventuelle chute ».
Jake Wujastyk, analyste des marchés en chef chez TrendSpider, arrive à une prédiction identique :
« Si l’on tient compte du mouvement enregistré entre les chandelles du plus bas de mars 2020 et celle d’octobre 2020 (7 mois) et qu’on l’applique au mouvement du plus bas de juin 2021, on arrive à 100 000 dollars à la fin de l’année, en supposant que le mouvement soit identique ».
Rappelons toutefois que les indicateurs techniques ont leur limites… et que rien ne permet de s’assurer que de telles prédictions vont pouvoir se réaliser. Le Bitcoin constitue la première expérience d’une cryptomonnaie de l’histoire, et il n’est pas à l’abri d’être un jour confronté à un évènement « Black Swan » qui viendrait causer la panique des investisseurs.
La flambée des « altcoins » pourrait empêcher le Bitcoin d’atteindre les 100 000 dollars cette année
Pete Humiston s’est également exprimé, de manière plus large, sur les crypto-marchés :
« Un passage à 100 000 dollars en 4 mois nécessiterait un afflux important de capitaux », a‑t-il expliqué. Bien que cela ne soit certainement pas impossible, cela semble peu probable maintenant que l’attention des investisseurs s’est tournée vers des cryptomonnaies alternatives comme l’Ether, le Cardano ou le Solana ».
Cette flambée de nombreux altcoins a contribué à la chute de la « Bitcoin Dominance » – la part de la valorisation du BTC sur celle de l’ensemble des crypto-marchés. Lors de la rédaction de cet article, ce chiffre ne s’élevait plus qu’à 41,4%, contre près de 70% au début de l’année 2021.
Pour Johnny Lyu, le PDG de la plateforme d’échange KuCoin, les « altcoins » devraient, dans les mois à venir, continuer à enregistrer de meilleures performances que leur grand frère :
« Il est important de comprendre comment l’ETH et les autres “altcoins” peuvent rivaliser avec le BTC pour attirer l’argent de nouveaux investisseurs, et comment ceux qui sont présents depuis longtemps sur le marché peuvent se comporter […].
L’adoption massive des cryptomonnaies ne pourra être atteinte sans la réussite des “altcoins”. De nombreux participants pensent qu’aux prix actuels, la valeur des “altcoins” est celle qui est le plus sujette à une nette augmentation ».
Le prix du Solana, par exemple, a été multiplié par plus de 100 depuis le début de l’année. Même le modèle optimiste S2F de PlanB ne place le Bitcoin qu’à 100 000 dollars d’ici à la fin de l’année, soit seulement 3 fois sa valeur du début 2021. De telles différences en termes de plus-values pourraient pousser les investisseurs à privilégier les « altcoins » au Bitcoin – même si celui-ci représente, en théorie, un investissement moins risqué.
Les institutionnels prêts à se tourner massivement vers le Bitcoin ?
Malgré la baisse de son aura sur les crypto-marchés, l’intérêt des investisseurs institutionnels pour le Bitcoin connaît une embellie par rapport aux niveaux observés en juin et juillet.
Microstrategy a effectué un nouvel achat de BTCs le 24 août dernier, pour 177 millions de dollars. L’entreprise détient approximativement 108 992 BTCs, achetés à un prix total de 2,918 milliards de dollars – soit 0,58% de l’offre en circulation (environ 18,8 millions de BTCs).
Même Citigroup, l’une des plus grandes institutions financières au monde, envisage de spéculer sur les contrats à terme sur le bitcoin proposés par le Chicago Mercantile Exchange, la principale bourse de produits dérivés financiers du globe. Selon des révélations récentes, la banque attend l’approbation des autorités pour commencer à s’appuyer sur ce véhicule d’investissement.
Pour Johnny Lyu, c’est la croissance des crypto-marchés dans leur ensemble qui permettra de renforcer l’intérêt des institutions pour ce secteur :
« Le rétablissement progressif de l’intérêt des institutions pour les cryptomonnaies est déjà évident.
Les nouvelles positives au sujet des investissements de SpaceX dans le Bitcoin, des mises à jour du réseau Ethereum en août et de celui de Cardano en septembre – tout cela vient neutraliser le marché baissier de mai et juin, et renforcer la confiance des investisseurs dans une éventuelle poursuite de la hausse ».
Pour Jake Wujastyk, le Bitcoin ne pourra flamber que s’il parvient à attirer de grandes quantités de capitaux – ce qui rend l’incursion des institutions décisive. L’appétence d’une partie de ces agents économiques pour les actifs numériques pourrait profiter à la fois au Bitcoin et aux « altcoins », dans ce qui constitue un mois redouté pour les crypto-marchés.
Références : CoinTelegraph, CoinMarketCap